Abeilles : l’Unaf sur la défensive

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Contrairement aux apparences, il semble que l’Unaf (Union nationale de l’Apiculture Française) soit en grande difficulté. Le syndicat apicole bien connu pour son opposition radicale aux produits phytosanitaires vient de lancer un appel à manifester le 22 janvier prochain à l’heure où doit se réunir le conseil d’administration du nouvel institut technique apicole. Dans un courrier adressé au parlementaires, l’Unaf n’y va pas par quatre chemins et leur demande (pardon les admoneste) « d’intervenir d’urgence et avec une extrême fermeté auprès du ministre de l’Agriculture ».


Pourquoi l’Unaf refuse donc la création de cet institut technique apicole préconisée par Martial Saddier dans son rapport « Pour une filière apicole durable » et attendue par l’ensemble de la filière ? Pour le syndicat, « la création d’un conseil scientifique qui disposerait de tous les pouvoirs décisionnels alors que la loi et le règlement ne lui autorisent qu’un rôle consultatif, s’accompagnerait de l’éviction systématique des chercheurs français des grands organismes publics de recherche tels que le CNRS et l’INRA qui ont mis en évidence les effets catastrophiques des pesticides pour l’abeille et les insectes pollinisateurs ». Traduction : il y aurait donc de bons et de mauvais scientifiques. Cela ressemble fort au remake du fameux sketch des inconnus sur le bon et le mauvais chasseur. Revenons à nos scientifiques. Comment distinguer un bon d’un mauvais  ? Rien de plus facile : les bons scientifiques sont français et penchent pour une origine unique des surmortalités d’abeilles, les pesticides. Les mauvais scientifiques, eux, estiment que le problème de l’affaiblissement et des mortalités des colonies est dû à de multiples facteurs : parasites, pathologies, virus, manque de biodiversité…


En organisant Apimondia à Montpellier en septembre dernier (le congrès mondial de l’apiculture), l’Unaf espérait voir la théorie de la responsabilité des pesticides affirmée par l’ensemble de la communauté scientifique. Mais tout ne s’est pas passé comme l’entendait son président Henri Clément. En effet, les conclusions d’Apimondia sont apparues clairement : l’origine des affaiblissements et mortalités des colonies d’abeilles a une cause multifactorielle. Après avoir investi beaucoup d’argent dans l’organisation de ce colloque, Henri Clément et les autres dirigeants de l’Unaf n’ont pas dû apprécier l’article de Gaëlle Dupont en couverture du Monde et son titre « les hécatombes d’abeilles ont des causes multiples ».


Difficile donc pour l’Unaf et pour son président de présenter un bilan positif de son action. Depuis des années, le nombre d’apiculteurs ne cesse de diminuer en France tout comme la production de miel. Et face à de réels problèmes, l’Unaf n’apporte que de fausses solutions. A tel point que l’on est en droit de se demander aujourd’hui dans quelle mesure l’Unaf est toujours un syndicat, prêt à apporter des solutions techniques à ses adhérents et à défendre une profession auprès des pouvoirs publics. Force est de constater qu’aujourd’hui, l’Unaf ne remplit plus ses fonctions. Car la réponse unique aux nombreux problèmes rencontrés par la filière, c’est de la com’ avec l’opération « Abeilles, sentinelles de l’environnement » (les fameuses abeilles en ville). Car avec cette opération, l’Unaf n’apporte pas un service à ses adhérents apiculteurs, mais cherche à sensibiliser le grand public. Outre que cela ne soit pas son rôle, les opération « abeilles en ville » sont inutiles sur un plan environnemental. La pollinisation est nécessaire, non pas en ville, mais en zone rurale. Opération inutile mais lucrative pour l’Unaf et surtout coûteuse pour le contribuable puisque les partenaires financiers de l’Unaf sont principalement des collectivités locales. Les ruches installées par l’Unaf en ville sont facturées quinze fois plus cher que pour des arboriculteurs ayant besoin de polliniser leurs vergers comme l’a récemment révélé l’association le magazine Le Cri du Contribuable (voir ici et ici). Le seul point positif du bilan de la présidence d’Henri Clément est donc médiatique puisque les médias en raffolent et… financier.


Cela étant posé, on se demande désormais si l’Unaf sortira un jour de l’idéologie et d’une approche exclusivement apicolo-apicole de l’apiculture. Rappelons tout de même que l’apiculture faisant partie de l’agriculture, un apiculteur est un agriculteur. Comment concevoir dès lors que l’Unaf refuse la présence de la FNSEA au sein du conseil d’administration de l’institut technique apicole ? Dans son appel à manifester le 22 janvier, l’Unaf annonce les slogans de la manifestation : « Non à la main mise de la FNSEA sur l’Apiculture » ou encore « Oui à une agriculture d’avenir respectueuse de l’abeilles ». Faut-il en conclure que la FNSEA n’a pas d’avenir ?


Terminons néanmoins sur une note optimiste pour l’apiculture française. L’institut technique apicole souhaité par l’ensemble des acteurs n’a jamais été aussi proche de (re)voir le jour. La filière en a un réel besoin pour apporter des solutions et bâtir « une filière apicole durable » pour reprendre le titre du rapport de Martial Saddier. A coeur ou à contre-coeur devant la pression de ses adhérents pragmatiques et soucieux de l’avenir de leur profession, l’Unaf ne pourra rester éternellement en dehors de l’institut technique sous peine de perdre toute crédibilité et de voir nombre de ses adhérents rejoindre d’autres syndicats ou structures apicoles efficaces qui mènent une véritable action au service de l’ensemble de la filière apicole et de la pollinisation. Autre cas de figure, si l’Unaf parvient par ces actions de rue et son lobbying ministériel et parlementaire à faire capoter la création de l’institut technique apicole, elle en portera l’entière responsabilité. Cela pourrait aussi lui couter très cher auprès des apiculteurs.

16 commentaires sur “Abeilles : l’Unaf sur la défensive

  1. l’Unaf ne pourra rester éternellement en dehors de l’institut technique sous peine de perdre toute crédibilité et de voir nombre de ses adhérents rejoindre d’autres syndicats ou structures apicoles efficaces qui mènent une véritable action au service de l’ensemble de la filière apicole et de la pollinisation.

    C’est ce qui pourrait arriver de mieux à la filière apicole, la vraie, l’authentique, la sincère!!

  2. Juste un point, je connais au moins un excellent chercheur français (de l’AFSSA) qui explique à qui veut l’entendre (preuves à l’appui) que les pesticides ne sont pas un élément clef de la mortalité des abeilles. Et qui depuis longtemps pointe du doigt la multiplicité des origines du problème, parasites, monoculture, traitements mal appliqués… Et qui en privé montre du doigt les pratiques aberrantes de certains apiculteurs, induites en partie par la prime à la reconstruction de rucher (exploitation éhontée des ruches conduisant à un affaiblissement et une disparition, et bingo une prime au passage). Et celles d’autres apiculteurs qui se font eux-même des cocktails de produits plus ou moins contrôlés (importés sans aucune autorisation) pour essayer de traiter les parasites (nosemia et varroa) mais en hurlant que la cause de leur problème est le pesticide passé 6 mois avant par le céréalier du coin.

  3. Les apiculteurs sont tellement satisfaits de leurs syndicats qu’ils sont en train de créer une section à la FNSEA !

  4. Bonjour à tous .. et toute.

    Et si on commençait 2010 par s’occuper des propres ruches, au lieu de chercher toujours querelle à son voisin. Avec le temps qu’il fait, faudrait quand même ben veiller sur son cheptel…. pollen, pollen ? ça ne vous dit rien ? bon courage et bonne saison apicole.

  5. Bonjour à tous

    Je reviens sur ce fil pour un grande nouvelle. Les api-écolo (apicolo; api-alcoolo …mdr) ont trouvé un nouveau responsable pour la mort des abeilles.
    Il s’agit du Proteus, un nouvel insecticide, tout juste autorisé. Comme je l’avais déjà écrit, après la faillite des attaques contre le régent, le cruiser ou le gaucho…, ils allaient attaquer un autre produit.
    Mais le hic c’est que ce produit est tout récent, et donc ne peux pas avoir causé le moindre problème sur les ruches. Surtout pas depuis 30 ans!!!

    http://www.ouest-france.fr/actu/actuDet_-Proteus-donne-le-bourdon-aux-apiculteurs-_3640-1290015_actu.Htm

    A que la dissonance cognitive est belle, que l’ignorance est propre et l’innocence rapporte plus rien…

  6. Les abeilles ne sont pas les sentinelles de l’environnement mais les sentinelles de l’incompétence crasse de la plupart des apiculteurs.

  7. Tout a fait d »accord avec zigomar. J’ai quitté mon syndicat local qui adérait à l’unaf parce que depuis 10 ans je constate a quel point l’unaf est sous la coupe d’un president imbu de sa personne qui ne pense qu’a se faire valoir et qui etoufe un bureau qui n’a plus aucun droit a la parole. Tous ceux qui contestent une idée d’henri Clement sont rejeté, isolé. L’ego de ce president est pathologique. Le dialogue est impossible. Lunaf va a sa perte par manque d’ouverture, d’ecoute et d’intelligence.

  8. @Laurent
    Oui c’est clair le Président de l’UNAF en fait exerce le métier de rédacteur d’une revue apicole et passe son temps a guerroyer et haranguer ses troupes pour sa croisade contre les firmes qui produisent des produits phytosanitaires destinés aux agriculteurs
    Idem contre les OGM

  9. Je suis d’accord sur tout ce qui est écrit ci-dessus. Mais que font des deux autres syndicats apicoles français ??? des analyses de miels??? on ne peux s’en contenter. Il est regrettable, désolant que ces trois organismes n’aient jamais tenté, essayer de se regrouper pour ne former qu’un seul syndicat apicole français qui, je pense,aurait peut-être beaucoup plus de force et d’écoute, qu’à l’heure actuelle, des pouvoirs public!!!
    Personnellement, je pratique l’apiculture depuis l’âge de 14 ans, diplomé d’apiculture en 1957, et, aujourd’hui à 75 ans, je suis éceuré de tout ces grenouillages et bagarres de clochers qui n’apportent rien à l’Apiculture.
    15 Novembre 2010 à 17h55

  10. Pour ré-équilibrer un peu les choses dans cet article très partisan mais les commentaires le sont tout autant. Bien sur que les abeilles sont sujettes comme toutes les etres vivants à des maladies ou des parasites.. mais ce n’est certainement pas une raison pour exclure l’impact des pesticides employés de maniere intensive.
    Rappelons que cette agriculture chimique que vous appelez conventionnelle n’existe que depuis quelques dizaines d’années… Les pesticides ont un impact sur les abeilles mais également sur l’homme.
    http://www.nosenfantsnousaccuseront-lefilm.com/
    Mais je pense que tout ca vous le savez, vous etes juste dans le déni, avec une posture qui gagnerait à être plus constructive.

  11. @sympinou: non sérieux ils vont nous accuser? T’a entendu parler des races d’abeilles qui font les réserves en haut de ruche? L’hypothèse alimentaire est la plus probable. Les pesticides années 50-60 étaient 10 000 fois plus dangereux et les abeilles n’avaient pas de problème cette époque.

    1. « En Suisse, les apicultrices/apiculteurs nous annoncent en moyenne 10 cas d’intoxications d’abeilles par année. Les causes de ces mortalités d’abeilles sont diverses et ne sont pas toujours imputables aux produits de traitement des plantes. Il faut aussi envisager, en autres, les diverses pathologies de l’abeille (Varroa et loques par ex.), les erreurs dans la pratique apicole (famine, essaimage par ex.) les intoxications d’origine naturelle ou la malveillance de la part de tiers. »

      http://www.agroscope.admin.ch/imkerei/00302/index.html?lang=fr

      Suspicions d’intoxication d’abeilles annoncés a la station de recherche de 1957 a 2005

      de 1957 a 1973 environ de 50 a 180 cas
      de 10 cas depuis 1997

      Voir : Plaquette 100 ans de recherches apicoles à Liebefeld

      http://www.agroscope.admin.ch/imkerei/00311/index.html?lang=fr

      1. tres interessant cette plaquette – existe-t-il en France des infos similaires ?

        La courbe sur le nombre d’intoxiciations rapportées (p26) laisse plus que présager les progrés accomplis par la recherche pour proposer des solutions / pratiques davantage respectueuses de la faune non cible.

  12. sympinou dit :
    16 mai 2011 à 10:58

    « Pour ré-équilibrer un peu les choses dans cet article très partisan mais les commentaires le sont tout autant. »

    – Au cas où vous ne vous en seriez pas rendu(e) compte, c’est le but même de ce genre de forum: échanger des idées, des arguments, des opinions. Bref, discuter entre personnes qui ne sont pas nécessairement d’accord! Sinon, où serait l’intérêt si tout le monde était de la même opinion? Se regarder le nombril et se satisfaire d’être de la même paroisse. je sais bien que c’est la position préférée des excrolos, se rentrouver entre soi et taper à bras raccourcis sur ceux d’en face pendant qu’ils ne sont pas là pour se défendre et répondre.

     » Bien sur que les abeilles sont sujettes comme toutes les etres vivants à des maladies ou des parasites.. mais ce n’est certainement pas une raison pour exclure l’impact des pesticides employés de maniere intensive. »

    – Si vous avez bien suivi les débats, ici, personne de sensé et/ou de compétent n’a exclu les effets des phytosanitaires sur les abeilles. Faut-il vous le répéter à nouveau: le syndrome d’effondrement des colonies est un phénomène multifactoriel dans lequel les phytosanitaires jouent un rôle dont les scientifiques du monde entier cherchent à évaluer l’impact.

    « Rappelons que cette agriculture chimique que vous appelez conventionnelle n’existe que depuis quelques dizaines d’années… Les pesticides ont un impact sur les abeilles mais également sur l’homme. »

    – Renseignez-vous un peu! Les produits chimiques sont utilisés en agriculture depuis un peu plus d’une centaine d’année et ceux qui étaient utilisés avant la seconde guerre mondiale n’avaient rien de « sympathique » croyez-le bien. Faites quelques recherches simples et vous verrez de quoi je parle.

    « http://www.nosenfantsnousaccuseront-lefilm.com/ »

    – Si c’est là votre seule source d’information, celà ne m’étonne pas que vous disiez ce que vous dites! Essayez d’élargir un peu votre horizon et vous verrez que la situation rélle ne correspond pas à l’apocalypse décrit dans ce « film ».

    « Mais je pense que tout ca vous le savez, vous etes juste dans le déni, avec une posture qui gagnerait à être plus constructive. »

    – C’est plutôt vous qui êtes dans le déni. Renseignez-vous sérieusement avant d’accuser sans preuve et colporter les ragots habituels des anti…..Quand vous aurez lu autre chose que les « oeuvres » de Madame M.-M. Robin, revenez ici et on discutera de tout çà sérieusement et calemement.

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