Stéphane Foucart pratique la Fabrique du doute

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Le dernier article de Stéphane Foucart dans Le Monde, daté du 17 avril, est un petit bijou dans l’art de rouler ses lecteurs dans la farine. Décryptage en 5 points.

 

1) Il utilise un titre inquiétant, à savoir « Liaisons troubles entre recherche publique et agrochimie », laissant entendre des révélations percutantes sur de possibles collusions entre la « gentille » recherche publique et les « méchantes » entreprises. Sous-entendant évidemment que les secondes corrompent la première, avec une ambiance à la X-Files – « la vérité est ailleurs ».

2) Il déballe le scoop selon lequel deux études françaises sur le déclin des oiseaux ont été partiellement financées et coordonnées par les fabricants de produits phytosanitaires BASF et Bayer. En effet, il explique : « A deux reprises, des travaux de chercheurs du Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), portant sur les effets des pesticides sur la biodiversité, ont été partiellement financés par les sociétés agrochimiques Bayer et/ou BASF. » Toutefois, il ne s’agit pas une grande révélation puisque le financement par Bayer et BASF est indiqué en toutes lettres sur les études en question. Et il le reconnaît lui-même : « La première précise qu’elle a été financée par Bayer et BASF ; la seconde qu’elle l’a été par BASF seulement. » Autrement dit, l’as de l’investigation parle au départ de « liaisons troubles » alors que ces liaisons sont parfaitement transparentes.

3) Stéphane Foucart jette ensuite le doute sur la méthodologie scientifique utilisée dans ces deux études : « Les choix scientifiques opérés dans le cadre de ce partenariat ont potentiellement conduit à minimiser les effets négatifs de produits phytosanitaires sur les oiseaux, par rapport à d’autres variables comme l’habitat et la structure du paysage. » Bref, les scientifiques du MNHN, corrompus par l’argent de BASF et Bayer, auraient utilisé une méthodologie pour épargner les produits des deux firmes. Et pour appuyer son message et lui donner autorité, Foucart explique que cette méthodologie est « critiquée par plusieurs scientifiques sollicités par Le Monde ». Il s’agit en l’occurrence de Dave Goulson (université du Sussex, Royaume-Uni) et Jeroen van der Sluijs (université de Bergen, Norvège). Or, dans ce cas-ci, Foucart omet de mentionner les « liaisons troubles » entre ces deux scientifiques et des ONG écologistes antipesticides, comme l’UICN et 38degrees. Simple oubli ou volonté de faire passer ces deux scientifiques comme « impartiaux » ?

4) Ce n’est pas tout. Foucart explique que les deux études « ont uniquement tenu compte des traitements pesticides appliqués en pulvérisation, les seuls à entrer en ligne de compte dans le calcul de l’indice réglementaire de fréquence des traitements chimiques (IFT) calculé pour chaque parcelle… Raison pour laquelle les « néonics », utilisés en enrobage de semences, n’ont pas été pris en compte ». Et là, Foucart ose ajouter : « Une omission critiquée par plusieurs chercheurs contactés par Le Monde, dont la plupart n’ont pas souhaité être cités. » Une phrase bien pratique qui permet de dire qu’il y a plein de chercheurs opposés à cette approche… mais, anonymat oblige, on est obligé de croire le journaliste sur parole.

5) Après avoir jeté le discrédit sur ces deux études et leurs auteurs soupçonnés de collusions avec Bayer et BASF, Foucart lâche à la fin : « La collaboration entre le Muséum et les industriels était le fait d’une demande du ministère de l’agriculture, expliquent les auteurs. Le projet était à l’origine de conduire une évaluation post-homologation de fongicides de BASF, financée par l’industriel. » Non seulement cette collaboration du Muséum avec les industriels était transparente mais c’était aussi une demande du ministère ! Et le pompon vient ensuite avec Foucart qui écrit à propos des auteurs des deux études : « Très peu suspects de complaisance vis-à-vis de l’industrie agrochimique, ils publient régulièrement des résultats embarrassants pour le modèle agricole dominant, les auteurs de ces travaux rappellent qu’ils sont encouragés par leur tutelle à nouer des partenariats avec des entreprises, faute d’argent public pour étudier les effets des polluants. » Après avoir passé son temps à discréditer les auteurs des deux études, il glisse en une phrase qu’ils sont « très peu suspects de complaisance vis-à-vis de l’industrie agrochimique ». Mais trop tard, Foucart a réussi à distiller le doute quant à la probité de ces chercheurs et à la valeur de leurs travaux.

Sources
http://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/04/17/liaisons-troubles-entre-recherche-publique-et-agrochimie_5286544_1650684.html
http://vincent.devictor.free.fr/Articles/Jeliazkov_et%20al_2016.pdf
http://seppi.over-blog.com/2015/11/dave-goulson-portrait-d-un-chercheur-militant.html

7 commentaires sur “Stéphane Foucart pratique la Fabrique du doute

  1. En plus, ce sinistre personnage s’est illustré récemment sur Twitter, au sujet d’un troll particulièrement néfaste qui se fait appeler Victor N…(je ne donne pas son nom complet, ça lui ferait de la pub). Les gens qui essayaient de répondre avec des arguments à ce troll ont été qualifiés de trolls par Foucart (qui a retiré son tweet peu de temps après, devant la bronca qu’il avait suscitée)

    1. Il faudrait lacher des punaises de lit et des moustiques tigre dans son environnement immédiat pour qu’il prenne conscience que toute la biodiversité n’est pas bonne à cotoyer.
      Un bon zika, suivi d’une bonne dengue et 6 mois de punaises de lit, comme le peuple aideraient à le transformer.

      Cela dit face à ces menaces les politiques veillent : http://www.lagazettedescommunes.com/560077/moustique-tigre-preparation-de-la-reponse-au-risque-de-dissemination-de-virus/

      Les politques veillent, s’endorment et ne font strictement rien, renvoyant sur des initiatives individuelles qui ne marchent pas ou pas suffisamment d’autant que les biocides efficaces sont retirés ou dilués. Contre les moustiques ou les punaises seule la lutte collective ( insecticides de synthèse divers), efficace et répétée fonctionne.
      Se protéger ( de façon relative) coute de plus en plus cher.

      Visiblement une décision ou une indécision qui vient d’en haut fait le lit des bestioles et des maladies qu’elles transmettent , quelles qu’en soient les conséquences (graves) pour notre santé, même celle des enfants à naitre avec le zika.

  2. Il faudrait lacher des punaises de lit et des moustiques tigre dans son environnement immédiat pour qu’il prenne conscience que toute la biodiversité n’est pas bonne à cotoyer.
    Un bon zika, suivi d’une bonne dengue et 6 mois de punaises de lit, comme le peuple aideraient à le transformer.

    Cela dit face à ces menaces les politiques veillent : http://www.lagazettedescommunes.com/560077/moustique-tigre-preparation-de-la-reponse-au-risque-de-dissemination-de-virus/

    Les politques veillent, s’endorment et ne font strictement rien, renvoyant sur des initiatives individuelles qui ne marchent pas ou pas suffisamment d’autant que les biocides efficaces sont retirés ou dilués. Contre les moustiques ou les punaises seule la lutte collective ( insecticides de synthèse divers), efficace et répétée fonctionne.
    Se protéger ( de façon relative) coute de plus en plus cher.

    Visiblement une décision ou une indécision qui vient d’en haut fait le lit des bestioles et des maladies qu’elles transmettent , quelles qu’en soient les conséquences (graves) pour notre santé, même celle des enfants à naitre avec le zika.

    1. Ils n’oseront jamais car dans un pays où l’état est surpuissant il y a forcément des abus de pouvoir. Si Basf et Bayer faisaient les malins ils verraient débarquer les kyrielles de fonctionnaires chargés de les mater : contrôle fiscal ( idéal pour faire perdre du temps et obtenir de l’argent face au pouvoir de nuisance de Bercy, insepcteurs du travail etc etc..) . Manque de chance, leurs dossiers d’homologation seraient un peu retardés etc… Seuls certaines firmes en situation de quasi monopoles peuvent exercer un contre pouvoir ( google, microsoft etc..)

  3. Très bel et terrifiant article, à lire absolument et en entier.
    Après cette lecture que pensez vous que les 180 000 (en fait plus de 500 000 )personnes atteintes par les punaises de lit aient envie de faire à Stéphane Foucart qui participe assez directement à leur désarroi en faisant interdire les moyens de lutter contre ce fléau… rien de moins que l’associer pour 6 mois minimum.

    http://grand-angle.lefigaro.fr/dans-lenfer-des-punaises-de-lit

    « Depuis, Eléonore nettoie, aspire, trie, empaquette tous les textiles et les livres, où les punaises seraient susceptibles de se nicher. Le but : préparer l’arrivée d’une entreprise de désinfection qui répandra de puissants insecticides dans les pièces concernées.  »

    « «D’un appel par semaine il y a cinq ans, on est passé à un appel par jour», rapporte à son tour Stéphane Bras, porte-parole de la Chambre syndicale des industries de désinfection, désinsectisation et dératisation (CS3D). Pour la première fois, ce syndicat, qui regroupe les deux-tiers des entreprises traitant les punaises, a fait les comptes : près de 180.000 sites ont été traités sur l’année 2016. «Tous les lieux où vous avez des gens qui se reposent sont concernés. Par exemple, des salles de cinéma mais aussi des loueurs de voitures», complète le professionnel. »

    La presse est bien discrète sur ce fléau voire muette , cela veut dire que dans les voitures de location, comme dans les avions , comme dans les chambres des hotels bien surveillés et bien tenus, comme dans les salles de cinéma, dont certaines en préventif, il y a des traitements systématiques avec des insecticides puissants pour prévenir l’infestation vu l’ampleur du phénomène qui sinon serait infiniment pire avec au moins une maladie transmise de façon certaine : la maladie de Chagas.

    On devrait réclamer une certification avant de poser ses fesses sur un fauteuil de cinéma… » traité avec des insecticides depuis moins de 15 jours  » pour ne pas ramener ces pas charmantes bestioles chez soi.

    Quid du métro parisien dont il est insinué, sous le manteau, qu’il pourrait parfois aussi être contaminé.

  4. et ce n’est pas fini… toujours dans la même excellente source, journal « le Figaro » dont je ne louerai jamais assez les mérites d’objectivité et de qualité journalistique
    http://grand-angle.lefigaro.fr/dans-lenfer-des-punaises-de-lit:
    « «J’ai compris par la suite qu’elles étaient venues d’une valise». La jeune femme avait loué son logement à un couple de touristes australiens quelques mois auparavant. Pourquoi ne pas avoir fait appel à un spécialiste ? «Je n’avais pas les moyens financiers et je n’ai pas osé en parler à mes propriétaires, de peur qu’ils veuillent par la suite mettre un terme à notre contrat». »
    AirBetB …punaises de lit garanties.

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