SDHI : nouvel épisode du marketing de la peur et de l’agribashing

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« Alerte scientifique sur les fongicides », « Les fongicides SDHI mis en cause par un collectif scientifique », « Une étude met en garde contre les fongicides qui pourraient gravement affecter la santé des êtres humains », « Un nouveau danger dans nos assiettes »… le buzz médiatique est au rendez-vous après la publication d’une tribune hier sur les SDHI.

De quoi s’agit-il ? Des chercheurs ont publié une tribune dans Libération dans laquelle ils s’inquiètent du ciblage de la succinate déshydrogénase (SDH) par certains fongicides agricoles qui pourraient avoir des conséquences graves sur la santé humaine. On parle de « graves encéphalopathies », « cancers », « maladie de Parkinson » ou encore de « perturbation de la mobilité des spermatozoïdes ». Cela fait froid dans le dos.

Qu’en pense l’Anses ?
C’est en effet l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail qui est en charge de l’homologation des produit phytosanitaires mis en cause. « Pour l’instant, l’évaluation scientifique des risques liés à l’usage de ces produits, qui prend en compte le mécanisme d’action, conclut à une absence de risque inacceptable. Et nous n’avons pas à ce stade d’éléments pour les interdire ou les suspendre sur la base d’hypothèses tirées de leur mécanisme d’action. (…) Nous avons demandé à M. Rustin (NDLR : le scientifique qui semble coordonner le collectif à l’origine de la tribune) de nous envoyer ses données, mais nous n’avons pas reçu d’éléments nouveaux qui permettraient d’alimenter une réévaluation des risques. Néanmoins, notre comité d’experts en charge de l’évaluation des pesticides sera très intéressé de l’auditionner sur le sujet. Et nous l’avons invité à venir consulter à l’agence les dossiers d’évaluation de ces fongicides pour en discuter de façon très ouverte. » En clair, l’Anses est rassurante sur l’impact des SDHI sur notre santé.

Une tentative d’agit-prop’ ?
Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette actualité est tout de même bien étrange. Il n’est pas fréquent de voir un collectif de scientifique communiquer directement dans la presse sans chercher à alerter les autorités sanitaires. La recherche du buzz serait-elle prioritaire par rapport à la santé de la population ? Ce « collectif » est d’ailleurs assez réduit puisqu’il ne se compose que de 9 membres, tous français. Les fongicides étant utilisés partout dans le monde pour protéger les cultures et garantir la sécurité sanitaire des récoltes pour les consommateurs, il est étonnant qu’en la matière seuls des scientifiques français soient mobilisés. En outre, il ne s’agit pas de présenter les résultats d’une étude mais de formuler des hypothèses à partir d’études dont la plus récente date de… 2016 ! Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de réagir ? Et encore une fois, pourquoi privilégier les médias aux autorités publiques ? D’ailleurs, le choix du titre de presse pour la publication de la tribune n’est pas anodin. Libération est en effet connu pour ses prises de position militante en matière de pesticides. La publication de la tribune est d’ailleurs accompagnée d’un article à tonalité alarmiste destiné à faire le buzz. Mission accomplie puisque les titres des articles consacrés au sujet sont anxiogènes. On retrouve ici les ingrédients du marketing de la peur. La conclusion de la tribune est d’ailleurs très militante puisque les signataires demandent de « suspendre l’utilisation tant qu’une estimation des dangers et des risques n’aura pas été réalisée par des organismes publics indépendants des industriels distribuant ces composés et des agences ayant précédemment donné les autorisations de mise sur le marché des SDHI », laissant ainsi entendre que les agences sanitaires seraient à la botte des industriels…

Appel à la rigueur scientifique
On peut donc se demander comment cette opération a été menée et par qui ? Qui est à l’origine de la tribune ? Qui s’est chargé de faire le lien avec la rédaction de Libération ? Qui a rédigé le contenu du texte qui ressemble davantage à un pamphlet qu’à une tribune ? Bref, est-ce le fruit de scientifiques devenus subitement des professionnels de la communication ou y-a-t-il eu manipulation ; et si oui, qui est à la manœuvre ?

Alors que le monde agricole est fortement mis en cause ces derniers temps malgré ses efforts pour répondre aux attentes sociétales tout en garantissant une production de quantité, de qualité et à un prix abordable, il serait vraiment souhaitable que l’ensemble des acteurs, y compris les chercheurs et les journalistes, fassent davantage preuve de rigueur et de retenue. C’est comme cela que la science et la société pourront avancer de manière efficace et vertueuse. Nous avons tous à y gagner.

 

 

 

12 commentaires sur “SDHI : nouvel épisode du marketing de la peur et de l’agribashing

  1. Les scientifiques en question ont publié des articles dans des revues scientifiques (où on espère que la rigueur est de mise). Ils écrivent par ailleurs une tribune. S’ils le font, on peut tout de même espérer que c’est parce qu’ils l’estiment nécessaire. Je ne comprends pas cette idée de « marchand de peur ». Ils n’ont rien à gagner à se mettre ainsi en avant. Maintenant, sont-ils excessivement prudents ou pas, je ne sais pas, mais la réponse de l’anses est tout de même particulièrement peu convaincante. Non ?

    Remarque factuelle : le dernier article est une prépublication de mars 2018. On ne peut donc pas dire que tout soit vieux !

  2. D’après une courte enquête sur internet, il semble que les auteurs aient contacté l’anses il y a environ 1 an. L’agence n’a pas donné suite. D’où sans doute cet autre moyen d’action pour « lancer l’alerte ». Cela aurait pu être expliqué dans la tribune initiale à mon avis, qui reste un peu vague (par diplomatie ?).

    1. « Ils n’ont rien à gagner » dites-vous!
      Si bien sur! Ils ont à gagner de pérenniser leurs crédits dits de recherche et leurs rémunérations et comme il n’y a que le « marche » de la trouille qui marche dans les media, lespolitiques, les consommateurs, a.lors allons y gaiévent. ….

      1. Effectivement. On pourrait y voir un plan de carrière. Mais il serait alors assez hasardeux… S’exposer ainsi quand on n’a en fait rien de sérieux à dire, ça laisse des traces. Quand on n’a rien de sérieux à dire, il vaut mieux faire profil bas.

        1. Il me semble qu’il y a des charlatans à qui ça a plutôt bien réussi… Des noms ! Des noms ! Ah non ! Ils font même appel au financement participatif pour défendre leur ‘honneur » scientifique au prétoire…

    2. ANSES: <>
      ce n’est pas tout à fait la situation de lanceurs d’alertes « obligés » de passer par la presse parce que les autorités font la sourde oreille…

      1. Tous les « Anonymes » ne sont pas les mêmes et la plupart des non « Anonymes » ne mettent pas leur nom !

        De mon côté et si cela vous intéresse, je suis l’anonyme de 17/04/2018 | 9:44, de 18/04/2018 | 7:41, de 18/04/2018 | 9:57 MAIS pas de 20/04/2018 | 1:38.ni de 19/04/2018 | 8:52.

        Et je suis aussi K. Depuis que j’ai vu où on pouvait mettre un pseudo. Mais je ne garanti pas être le seul K. Passionnant non ? Non.

      2. Anonyme demeure un choix de pseudo comme un autre !

        Vous vous cacher bien derriere ADMINALERTE ?
        Et puis toute cette flopée de lobbystes bien connus qui écrivent leurs intox sous pseudos affichent t’ils réellement leurs noms ?

        ALORS COMMENCEZ DONC PAR BALAYER DEVANT VOTRE PORTE !!!

  3. Je pensais qu’à l’INSERM justement on avait dit aux chercheurs de faire attention à ce qu’ils racontent

Les commentaires sont fermés.