Quand les écologistes banalisent le nazisme

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Début octobre 2010, le journaliste Eric Conan écrivait dans Marianne un article intitulé « Les idiots utiles de la Vichymania », dans lequel il se plaignait de voir Vichy ou Hitler être régulièrement appelés à la rescousse pour dénigrer ses adversaires ou certaines politiques. Il constate ainsi : « C’est la mode : on met Vichy à toutes les sauces. Pour un rien, on évoque la délation. Pour une broutille, on renvoie son contradicteur dos à dos avec Hitler. » Et le débat sur les OGM n’échappe pas à cette mode, comme en témoigne les propos de Noël Mamère tenus lors des débats à l’Assemblée nationale sur le loi OGM en 2008 : « Même si quelques négationnistes soutiennent le contraire, tous les scientifiques sont d’accord pour dire qu’il n’est pas possible de faire coexister les cultures OGM et les cultures non OGM. »

Certaines illustrations de la bande dessinée La guerre des OGM (Delcourt, 2009) sont tout aussi choquantes. Ainsi, on passe allègrement des plantes génétiquement modifiées à la modification génétique des êtres humains, afin de mieux entretenir l’amalgame entre les biotechnologies végétales et le nazisme (voir illustration ci-contre). Le livre Faucheurs Volontaires (Dessin’acteurs, 2010), destiné à remplir les caisses des saccageurs d’OGM, reprend la même dialectique : une illustration avec le titre « De hamburger à hamburger », fait ainsi référence au film De Nuremberg à Nuremberg (voir illustration ci-contre). Là, l’amalgame entre OGM-hamburgers et Hitler-nazis est encore plus explicite.

Tout cela concourt évidemment à une banalisation des crimes nazis, comme l’explique Eric Conan : « Ceux qui profèrent ces inepties comprennent-ils seulement ce qu’ils disent ? Ont-ils conscience que, ce faisant, ils banalisent le nazisme, le vrai ? (…) Parce qu’au-delà de leur obscénité, ces raccourcis ineptes risquent d’avoir des conséquences terribles à une époque où l’inculture historique progresse et où les réalités criminelles du XXème siècle sont de plus en plus difficiles à évoquer avec des jeunes générations perméables aux rumeurs les plus dingues. Le propre de la désinvolture avec la vérité historique est d’ignorer le mal qu’elle entraîne. La plupart de ceux qui transforment l’Histoire en libre-service à la disposition de leur bonne conscience ne se doutent pas de l’effet de leurs métaphores. Non seulement ils méconnaissent l’une des exigences minimales du devoir de mémoire – le respect pour le destin des victimes, des morts et de tant de vies brisées -, mais encore ils banalisent dangereusement les événements de ces époques tragiques. Surtout, ils ne voient pas qu’en répétant que la France d’aujourd’hui est à l’image de celle d’hier, ils laissent entendre que, finalement, Vichy et le nazisme n’ont pas dû être si terribles que cela. »

Cette utilisation abusive du nazisme ou du vichysme pour qualifier ses opposants n’est pas « seulement » intolérable du point de vue éthique ou moral. Elle pourrait également avoir d’autres conséquences encore plus odieuses. Car, face à la menace des OGM, qui serait semblable à celle du nazisme, certains activistes anti-OGM, poursuivent l’amalgame se prenant volontiers pour des « résistants ». Au risque qu’un jour ou l’autre, un individu, pas tout à fait équilibré, aura tellement bien assimilé le discours qu’il décidera de s’occuper de façon violente de ceux qu’il aura assimilé comme de dangereux criminels nazis. Stigmatiser avec une telle outrance ses adversaires est donc un exercice particulièrement dangereux et irresponsable.

Sources

12 commentaires sur “Quand les écologistes banalisent le nazisme

  1. « Stigmatiser avec une telle outrance ses adversaires est donc un exercice particulièrement dangereux et irresponsable. »

    Effectivement, et stigmatiser de cette façon c’est attiser la haine, utiliser la technique du bouc émissaire.

    Pour ceux qui s’intéresse au bouc émissaire , voir mon article « On a toujours besoin d’un bouc émissaire » sur http://laurent.berthod.over-blog.fr/article-on-a-toujours-besoin-d-un-bouc-emissaire-64575709.html

  2. On peut proposer le syllogisme suivant:

    1- Les principaux médias en France sont aux mains ( propriétaires) ou contraints ( publicité) / de grands groupes financiers et industriels.

    2 – La totalité des médias colportent des arguments médiocres pour favoriser la peur des OGM ( Kempf et consort), du « crédo » du réchauffement climatique qui est devenu récemment changement ou dérèglement, valorisent sans exception comme héros modernes Nicola Hulot, YAB, courage qui leur rapportent reconnaissance du grand public mais surtout des millions d’euros et pas seulement à leur association . Frappent d’ostracisme toutes les opinions contraires à ce qui est devenu une religion de fait aussi vindicative que l’église de Rome en plein milieu du moyen age, avec ses dogmes, ses inquisiteurs, ses procès en sorcellerie ….

    3 – Ceux qui s’opposent à ce pouvoir qui associe médias, finance et groupe industriels ( Carrefour, Air France, EDF, Bouyges…) sont donc des résistants et non des négationistes puisque l’oppression verte est actuelle et non pas passée et le pouvoir financier et industriel soutient cette religion verte qui n’admet pas la controverse. Les résistants sont donc du coté de Claude Allègre qui se pose en un porte drapeau, utile, même si parfois on peut lui repprocher d’en faire plus que nécessaire.

    Les résistants résistent à l’opinion dominante qu’il est de bon ton d’exprimer sous peine de represailles du style de la pétition aux 500 signatures, de caricatures dans les journaux ou de tarte à la crème, faisant cela sans risquer la prison comme les faucheurs d’OGM, on mesure où est la véritable oppression et où est la véritable résistance.

    Enfin en Tunisie, ce n’est pas du blé bio ( 50% plus cher) que reclamaient les manifestants qui ont renversé le pouvoir mais tout simplement de quoi se nourrir.

  3. Cher Alzine,

    Ce n’est pas d’en faire plus que nécessaire qu’on peut reprocher à Claude Allègre. C’est de ne pas le faire toujours aussi bien qu’il en est capable, sans doute par paresse et/ou négligence. Négligence coupable, néanmoins, car il donne des verges pour se faire battre et, plus triste encore, pour battre la cause qu’il défend et qui nous tient à cœur.

    Faisons aussi attention à ne pas exploiter de façon illégitime l’héroïsme de nos pères qui ont risqué leur vie dans la résistance. Mais, d’accord avec vous pour retourner, comme on retourne un gant, l’accusation de négationnisme.

  4. Cher Laurent Berthod,

    Effectivement nous séparerons la résistance à l’opinion dominante colportée et imposée par les médias, thèses soutenue par Claude Allègre et la Résistance, qui appartient désormais à l’histoire, dans un contexte de risque maximal et d’oppression généralisée, Résistance qui correspondait , alors, à un engagement de la première heure et ne peut être revendiquée pour éclairer l’actualité sans un sérieux risque de falsification quelle que soit la légitimité passée de celui qui y fait référence.
    Les exemple en la matière sont nombreux.

  5. comment pouvoir et medias agissent pr descendre les ecolos.

    bonjour,

    Quand on veut tuer son chien, on l’accuse de la rage. Pour tenter de se débarrasser des écologistes, on les taxe de fascisme larvé.

    Le procédé avait été utilisé au début des années 1990 lorsque, devant la dégénérescence du socialisme de gouvernement, les écologistes remportaient d’étonnants succès électoraux. La presse, avec l’esprit grégaire qui la caractérise souvent, avait alors dénoncé la menace des « verts-bruns », en s’appuyant sur le livre de Luc Ferry, Le Nouvel Ordre écologique (Grasset, 1992). Cet ouvrage constitue un modèle de manipulation intellectuelle : les citations tronquées ou carrément inventées des auteurs que dénonçait Ferry conduisaient le lecteur candide à la conclusion incontournable que l’écologie était le meilleur chemin pour la dictature (1).

    A l’époque, la faiblesse intellectuelle du mouvement écologiste ne lui avait pas permis de faire face à cette grossière offensive, qui l’avait durablement affaibli. La même opération semble être menée, de manière moins systématique mais persistante, à l’encontre des objecteurs de croissance. On suggère ainsi une proximité entre la décroissance et l’extrême droite, en s’appuyant sur un groupuscule et quelques individus isolés.

    Cette thèse ne résiste pas à l’examen des propos abondants des objecteurs de croissance. La lecture des journaux La Décroissance ou Silence, des revues Entropia ou Ecorev, des textes de l’Association des objecteurs de croissance (ADOC), atteste sans ambiguïté qu’ils s’inscrivent dans la perspective d’une démocratie et d’une gauche renouvelées par le questionnement écologique.

    En revanche, si l’on consulte le programme du Front national, on ne trouve aucune apologie de la décroissance, mais bien au contraire une obsession de la croissance qui ne le distingue pas de l’UMP, du MoDem ou du PS. Le fait que ces partis sacrifient comme le FN à la déesse croissance les range-t-il à l’extrême droite ?

    D’une certaine manière, oui. Augmenter la taille du gâteau permet de distribuer des miettes à tout le monde et de calmer la colère montante des exclus et des classes moyennes. L’obsession de la croissance découle ainsi du refus du capitalisme de remettre en cause des inégalités devenues ahurissantes.

    Mais comme la croissance du PIB est de plus en plus freinée par le désordre financier et la crise écologique qu’elle aggrave, les tensions sociales se durcissent. Cela conduit au raidissement autoritaire du capitalisme. Répression policière accrue, vidéosurveillance, fichage généralisé, contrôle des médias, multiplication des prisons, recours au nationalisme (« identité nationale »)… « Dans l’avenir, la logique inhérente au capitalisme le conduira à limiter les libertés », notait naguère Slavoj Zizek (2). L’avenir, c’est aujourd’hui. La question qui se pose …..
    Herve kampf…

    1. Ferong, tu devrais quand même lire le billet en entier et pas seulement le titre. En l’occurrence, le sujet, ici, n’est pas de savoir si l’écologisme peut mener à la dictature, mais que les écologistes banalisent le nazisme en traitant de nazis les producteurs d’OGM et de hamburgers. Quand on veut tuer son chien, on l’accuse de la rage…

  6. « Une gauche renouvelée par le questionnement écologique » ?

    Ah ! Ah ! Ah ! Laissez moi rire ! L’écologisme n’est certes pas le fascisme ni le nazisme, mais c’est cependant l’idéologie la plus réactionnaire qu’on ait inventée depuis le romantisme allemand !

    D’ailleurs en ce moment ça branle dans le manche très fort sur le nucléiaire entre PS et EEV. J’espère que ça ira jusqu’à la rupture, on verra alors les écolos sous leur vrai jour, quand il n’auront plus le cache-sexe de l’alliance avec le PS pour se faire passer comme de gauche.

    De gauche, les écolos ? Ah ! Ah ! Ah !

  7. c’est rien, Laurent, encore un adepte du copier-coller (des gars incapables d’écrire et de penser par eux-mêmes, il leur faut une bouillie pré-digérée), en plus même pas foutu de citer correctement le nom de l’auteur…

  8. « en plus même pas foutu de citer correctement le nom de l’auteur… »

    Je crois qu’il s’agit plutôt d’une marque ironique (Mein Kampf). La seule chose originale de Ferong dans cette bouillie pour chat de Kempf, un idéologue, un militant, qui se prend pour un journaliste à qui le « journal de référence  » ouvre ses colonnes. Ah ! Ah ! Pauvre Hubert, il doit se retourner dans sa tombe de voir à quel niveau lamentable ses successeurs, à force de compromis avec les idées à la mode, de lâchetés, de faiblesse intellectuelle, ont fait tomber le titre qui était l’oeuvre de sa vie. 🙁

  9. http://www.presseurop.eu/fr/content/article/1899561-des-neo-nazis-certifies-bio

    Des néo-nazis certifiés bio

    De la protection de la nature à celle de la patrie

    La protection de l’environnement n’a jamais été le domaine réservé des Verts. Ce mouvement est né au XIXe siècle en réaction à l’industrialisation. Il fut également un thème central de l’idéologie nazie qui a fait adopter deux textes de loi pour la protection des animaux et celle de l’environnement en 1933 et en 1935. La protection de la nature et celle de la patrie ainsi que l’idéologie du sang et du sol sont au cœur du discours national-socialiste. « Dans presque tous les domaines, l’idéologie nazie a servi de socle au mouvement de protection de l’environnement”, explique Nils Franke,

    1. Un ami gauchiste m’en a parlé il y a quelque année déjà, c’est logique qu’une idéologie réactionnaire et tournée vers un passé idéalisé soit attiré par une autre idéologie réactionnaire et tournée vers un passé idéalisé.

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